Royaume-Uni : tollé après l’adoption de la loi sur l’expulsion des migrants vers le Rwanda

Après des mois de débats au Parlement britannique, le projet de loi permettant l’expulsion vers le Rwanda de demandeurs d’asile entrés illégalement au Royaume-Uni a finalement été adopté lundi 22 avril dans la nuit. Mais ce projet controversé est très critiqué par l’opposition travailliste, par des associations d’aide aux migrants, ainsi que par le haut commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme et la justice européenne. Ils jugent que « le Rwanda n’est pas un pays sûr ».

Après des mois d'aller-retours entre les deux chambres du Parlement britannique, le texte est passé dans la nuit de lundi 22 à mardi 23 avril.

La chambre des Lords – où les conservateurs n’ont pas la majorité – avait jusqu'à présent retardé l’adoption de ce projet. Cela en déposant différents amendements. Puis la chambre haute a décidé de ne plus amender le texte, garantissant son entrée en vigueur.

Le texte prévoit le renvoi au Rwanda de tous les demandeurs d’asile entrés illégalement au Royaume-Uni, d’où qu’ils viennent.

Pour cela, Londres a passé un accord avec Kigali, qui prévoit le versement financier en échange de l’accueil des migrants, le Rwanda étant décrit par Londres comme un pays « sûr ».

Cela avait toutefois été remis en cause par la Cour suprême britannique il y a quelques mois : elle avait jugé le projet illégal. Idem du côté de la justice européenne. Le Conseil de l'Europe, qui réunit 46 membres, dont le Royaume-Uni, est dépositaire de la Convention européenne des droits de l'Homme. Cette dernière avait stoppé in extremis, en juin 2022, un premier vol prévu vers le Rwanda.

Cette nuit, le Premier ministre britannique Rishi Sunak a mis en garde : « Aucune cour étrangère ne nous empêchera de faire décoller les avions. » Car le projet a été adopté définitivement : n’y ayant plus de recours législatif possible, il s’agit d’une adoption définitive. Il ne reste plus que le sceau du roi Charles.

Des recours juridiques sur des cas individuels sont néanmoins à prévoir. Selon le porte-parole adjoint du gouvernement rwandais Alain Mukuralinda, au micro de notre correspondante à Kigali, Lucie Mouillaud, « les réfugiés ou les migrants qui ne seront pas contents des décisions qui ont été prises pourront toujours faire appel, et ce tribunal sera constitué par des magistrats rwandais et des magistrats anglais ou du Commonwealth », avait-il affirmé en décembre.

« Atteinte à l'indépendance de la justice »

L’ONU a demandé à Londres de « reconsidérer son plan », dénonçant des lois britanniques « de plus en plus restrictives qui ont érodé l'accès à la protection des réfugiés » depuis 2022.

Peu après l’annonce, le haut commissaire aux droits de l’Homme des Nations unies a estimé que « cette nouvelle législation entrave sérieusement l’État de droit au Royaume-Uni et crée un précédent dangereux dans le monde ».

Volker Türk estime que le texte va « à l'encontre des principes fondamentaux des droits humains ». Avec son homologue en charge des réfugiés, Filippo Grandi, il a appelé le gouvernement britannique « à prendre plutôt des mesures pratiques pour lutter contre les flux irréguliers de réfugiés et de migrants, sur la base de la coopération internationale et du respect du droit international des droits de l'Homme ».

Le commissaire du Conseil de l'Europe pour les droits de l'Homme, Michael O'Flaherty, a qualifié de son côté cette loi d'« atteinte à l'indépendance de la justice ».

De son côté, Kigali s'est dit « satisfait » par l'adoption du texte. La porte-parole du gouvernement Yolande Makolo ajoute que les autorités sont « impatientes d'accueillir les personnes relocalisées au Rwanda ».

Moins d’une dizaine de migrants concernés au départ, pour un coût faramineux

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  • Le Premier ministre britannique a assuré que son gouvernement était prêt à expulser les premiers migrants d’ici dix à douze semaines. Le gouvernement a mobilisé des centaines de personnels, et des avions charters ont déjà été réservés, a-t-il indiqué. Cependant, cela concernera moins d’une dizaine de migrants au départ.

    Sur place, Kigali étudiera leur demande d’asile. Pendant ce temps, ils seront logés, pourront bénéficier de formations, le tout payé par les Britanniques. À terme, ils pourront également travailler.

    Mais il reste de nombreuses incertitudes. Combien de migrants pourraient être concernés, sachant que 30 000 personnes ont traversé la Manche illégalement en 2023 ? Puis, combien de temps les Britanniques financeront-ils l'intégration de ces migrants au Rwanda ?

    Le coût du projet est estimé à plus de 2 millions d’euros par personne, soit une somme faramineuse, réagit l’opposition britannique. Celle-ci affirme que la mesure ne réussira pas à mettre fin aux traversées de la Manche.

    Avec RFI

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