La Russie et la Corée du Nord, deux alliés invincibles ?

La Russie a imposé jeudi 28 mars la dissolution du système de surveillance des sanctions de l'ONU contre la Corée du Nord et son programme nucléaire. Un veto russe au Conseil de sécurité jugé « irresponsable » par la Corée du Sud et fustigé par les États-Unis et ses alliés. 

L’avenir du groupe d’experts de l’ONU sur les sanctions contre la Corée du Nord s’assombrit. Jeudi, au Conseil de sécurité de l'ONU, la Russie a opposé son veto au renouvellement de son mandat. Un épisode qui illustre les tensions croissantes au Conseil de sécurité et qui risque de priver les États membres d’un outil créé en 2009 pour éclairer les politiques menées par la Corée du Nord, et lutter contre ses méthodes pour éviter les sanctions.

La Corée du Nord est en effet soumise depuis 2006 à des sanctions de l'ONU liées à son programme nucléaire, renforcées plusieurs fois en 2016 et 2017. Mais depuis 2019, la Russie et la Chine, mettant notamment en avant la situation humanitaire de la population nord-coréenne, réclament l'allègement de ces sanctions, qui n'ont pas de date de fin.

Malgré plusieurs reports du vote pour permettre des négociations, la Russie a ainsi mis son veto jeudi au projet de résolution prolongeant d'un an le mandat de ce comité. Le texte a recueilli 13 voix pour, la Chine s'étant abstenue.

Un outil essentiel

Publié début mars dernier, le premier des deux rapports annuels du comité d’experts pourrait donc être le dernier. Il avait pourtant mis en lumière le rôle des hackers du régime, le nombre de travailleurs nord-coréens à l’étranger, les violations des sanctions maritimes et des limites d'importations de pétrole, ainsi que les différentes méthodes utilisées par Pyongyang pour obtenir des devises tout en contournant les sanctions.

Le comité affirme d'autre part avoir commencé à enquêter sur « des informations » faisant état de l'exportation par la Corée du Nord « d'armes conventionnelles et de munitions » en violation des sanctions, notamment vers la Russie.

Un outil crucial dans le contexte géopolitique actuel selon Nicolas de Rivière, représentant permanent de la France auprès des Nations Unies : « Depuis des mois, la Corée du Nord fournit la Russie en matériel militaire en soutien à sa guerre d’agression en Ukraine, et ce en violation de multiples résolutions que la Russie a elle-même voté. Un nouvel essai nucléaire ne peut être exclu. Dans ce contexte, qui peut sérieusement douter de la nécessité d’un groupe d’experts indépendants permettant de documenter les violations des résolutions de ce conseil ? », pose-t-il au micro de notre correspondant à Séoul, Nicolas Rocca. 

Veto russe largement dénoncé

Pour justifier son veto, l’ambassadeur russe a assuré que le comité avait servi les intérêts occidentaux et bloquait la capacité du conseil à pouvoir réexaminer la pertinence des sanctions dans le temps. Un argument rejeté par l’ambassadeur français : « Que l’on ne nous dise pas qu’il fallait modifier ou sacrifier le mandat du groupe d’experts pour permettre une discussion générale sur la révision des sanctions. Le projet de résolution présenté aujourd’hui proposait même qu’un tel réexamen ait lieu d’ici avril 2025 », rapporte-t-il. 

Ce coup de force de la Russie a tout de suite été dénoncé par les États-Unis et ses alliés, qui fustigent une protection mutuelle entre les deux pays. « Ce qu'a fait la Russie aujourd'hui avec cynisme sape la paix et la sécurité dans le monde, tout cela pour favoriser un troc vicié que Moscou a scellé » avec Pyongyang, a réagi Matthew Miller, porte-parole du département d'État américain. De son côté, Séoul a qualifié de « décision irresponsable » le veto de la Russie, via un communiqué du ministère sud-coréen des Affaires étrangères.

« Ce veto n'est pas un signe de l'inquiétude pour la population nord-coréenne ou pour l'efficacité des sanctions. Cela concerne la Russie, obtenant la liberté de violer les sanctions en quête d'armes pour les utiliser contre l'Ukraine », a signalé l'ambassadrice britannique à l'ONU Barbara Woodward. Le comité doit continuer à travailler jusqu’au 30 avril avant la fin de son mandat. Sa disparition ne remet pas en cause la continuité des sanctions contre la Corée du Nord.

Avec RFI

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