RDC-Ass.Nat : « La fraude à la constitution au cœur du projet de loi Minaku et Sakata », nouvelle tribune de Lucien Buhendwa


Les démarches des députés nationaux, Minaku et Sakata, relatives à un projet de loi sur la réforme judiciaire ne cessent de susciter des réactions dans la classe politique et intellectuelle en République Démocratique du Congo. Nombreux sont ceux qui rejettent ces propositions et estiment que ces deux députés du FCC cherchent à violer sciemment les dispositifs légaux pour que ceux de leur camp qui seraient impliqués dans certaines infractions ne soient plus poursuivis.

Lucien Buhendwa, analyste indépendant et chercheur en droit constitutionnel, a dans une nouvelle tribune consultée par election-net.com, dénoncé ce qu’il appelle une fraude à la constitution. Selon lui, Minaku et Sakata, veulent mettre en profit leur majorité parlementaire dans le but de bien contrôler le pouvoir judiciaire, ce qui reste un mépris de la séparation du pouvoir initialement prévu par le constituant originaire.

Ci-dessous l’intégralité de sa réflexion :

« Tout d'abord, il faut dire que l'inadaptabilité du projet de loi de l'honorable Aubin Minaku et Garry Sakata est manifeste dans la législation congolaise.

D'ailleurs, ledit projet de loi nous donne l'opportunité d'informer l'opinion que la loi de 2011 portant révision de certaines dispositions de la Constitution avait fraudé à la constitution, notamment et à titre illustratif l'article 149.
Rappelons que c'est lors de la révision de l'article précité, que les magistrats du parquet s'étaient vu placés sous l'autorité du ministre de la justice (garde des seaux)

Il faut dire honnêtement, que c'était une façon de créer une inféodation du pouvoir judiciaire sur le pouvoir l'exécutif, au mépris de la séparation initialement prévu par le constituant originaire.

Comme si cela ne suffisait pas, voici aujourd'hui l'honorable Minaku avec son collègue Sakata viennent encore tripoter la Constitution de la République.

Il nous semble que le mot approprié pour qualifier leur manœuvre, c'est la fraude à la constitution.

La notion de fraude à la constitution a été pour la première fois employée par Georges Liet- Veaux. Il définit la fraude à la constitution comme le procédé « par lequel la lettre des textes est respectée, tandis que l'esprit de l'institution est renié. Respect de la forme pour combattre le fond.
C'est-à-dire, la fraude à la Constitution, c'est le procédé par lequel le constituant de révision utilisé son pouvoir, dans un but, autre que celui duquel, il lui a été octroyé, autrement dit, il instaure un régime totalement différent de celui du constituant originaire.

Sans perde de vue, dans notre travail scientifique (mémoire) intitulé La RDC entre régime démocratique de droit et autoritaire de fait: la fraude à la Constitution une des causes, nous avons eu le privilège de lire l'ouvrage du Doyen Ambroise Kamukuny " contribution à l'étude de la fraude constitutionnelle en RDCongo.

Dans son valeureux ouvrage de 2011, le professeur Ambroise Kamukuny, dit que ce n'est pas seulement l'autorité de révision qui peut frauder à la constitution, il estime que les trois pouvoirs classiques peuvent également frauder à la constitution, et chacun dans l'exercice de ses attributions : le législatif dans sa mission d'élaborer les lois, l'exécutif dans la sienne d'exécuter les lois mais également le judiciaire dans sa mission aussi de dire le droit.

Actuellement, la démarche d'Aubin Minaku et son collègue Sakata n'est autre que celui de passer encore outre la volonté du constituant de 2006.
Ils veulent mettre en profit leur majorité parlementaire dans le but de bien contrôler le pouvoir judiciaire.

Rappelez-vous, comment on l'a si bien dit ab ovo que le fraudeur de la constitution ou délinquant constitutionnel utilise les artifices légaux dans le buf de contredire le constituant originaire.

Ce n'est pas inutile de de dire que toute violation de la constitution n'est pas fraude à la constitution mais toute fraude à la constitution implique violation de la Constitution.

Nous attirons l'attention des juges constitutionnels sur les projets de loi en cour mais également sur la loi ayant révisé la constitution en 2011, car il nous semble que notre constitution risque de se vider de sa substance à travers les mécanismes législatifs».

Lucien Buhendwa analyste indépendant et chercheur en droit constitutionnel


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