USA : Steve Kerr, l'entraîneur NBA à la pointe de l'attaque contre Donald Trump

Steve Kerr, l'entraîneur NBA


Le coach star des Golden State Warriors, qui a affiché son soutien à l'université de Harvard prise pour cible par Donald Trump, se distingue depuis des années par ses critiques envers l'actuel locataire de la Maison Blanche.

Il aura fallu attendre presque trois mois après le retour de Donald Trump à la Maison Blanche pour entendre une personnalité sportive critiquer publiquement le président américain. Celui qui est sorti du bois mardi 15 avril n'est pas n'importe qui : Steve Kerr, l'entraîneur de basket multi-titré des Golden State Warriors, est aussi le sélectionneur de Team USA, l'équipe nationale masculine médaillée d'or aux JO de Paris.

Alors que la franchise californienne venait de se qualifier pour les phases finales du championnat, le coach de 59 ans s'est présenté en conférence de presse d'après-match vêtu d'un t-shirt de l'université de Harvard. Le vêtement, a-t-il expliqué, lui a été offert par son ami Tommy Amaker, qui dirige depuis dix-huit ans l'équipe de basket de la prestigieuse université du Massachusetts. « J'ai eu l'impression que c'était un grand jour pour le porter. »

La veille, le président américain avait décidé de geler 2,2 milliards de dollars de fonds fédéraux alloués à Harvard. La raison ? Le refus de l'université de se plier àses exigences en matière d'enseignement et de recrutement. Donald Trump et son camp accusent l'institution aux 162 prix Nobel de laisser prospérer l'antisémitisme sur son campus, et lui reprochent de ne pas avoir empêché les manifestations pro-palestiniennes qui s'y sont déroulées au printemps dernier contre la guerre menée par Israël à Gaza. « Je crois en la liberté académique et je pense qu'il est crucial pour toutes nos institutions de pouvoir gérer leurs propres affaires comme elles l'entendent », a affirmé Steve Kerr en conférence de presse. Pour conclure, sourire en coin : « Alors oui, je soutiens Harvard. Bravo à elle de tenir tête à la brute. »

Politisé

Que les premières critiques du monde sportif contre le 47e président des États-Unis émanent d'une figure de la NBA, et de lui en particulier, n'est pas une surprise. La ligue américaine de basket est traditionnellement plus politisée que celles de football ou de baseball. Et l'ancien arrière des Bulls époque Jordan se distingue depuis des années par son engagement politique. En août dernier, il était même à Chicago pour apporter son soutien au ticket Kamala Harris-Tim Walz lors du congrès du Parti démocrate. « Ils possèdent le leadership, le vrai, pas celui qui cherche à nous diviser, mais celui qui reconnaît et célèbre notre objectif commun », avait-il vanté, plein de sous-entendus.

Longtemps, pourtant, Steve Kerr s'est cantonné à ce qu'il savait faire de mieux : enquiller les paniers longue distance, d'abord à l'Université d'Arizona, puis au sein de six franchises NBA. Il était ce « role player » de luxe, capable de sortir du banc pour planter la banderille qui tue le match. « Un leader naturel qui communique bien et qui possède une intelligence supérieure à la moyenne », dira de lui Gregg Popovich, son entraîneur chez les San Antonio Spurs. Le bilan de ses quinze années de carrière est élogieux : cinq bagues de champion et la meilleure adresse à 3 points de l'histoire de la ligue.

Onze ans après son départ des parquets, il est de retour sur le banc en 2014, cette fois comme entraîneur des Golden State Warriors, avec un nouveau titre à la clé dès la première année, puis un autre deux ans plus tard et un troisième dans la foulée. Le tâcheron qui avait passé sa carrière de joueur dans l'ombre des plus grands prend alors une autre dimension. On ne l'interroge plus seulement sur les performances de son équipe, mais aussi sur les débats qui animent la société. Et sur tous ces sujets, Kerr a une opinion bien tranchée.

Il dénonce les inégalités raciales et soutient le mouvement Black Lives Matter. Il blâme Donald Trump, dont il réprouve l'absence de dignité. « L'homme qui va vous diriger a régulièrement tenu des propos racistes, misogynes et insultants », prévient-il au lendemain de la victoire du républicain en 2016. Il critique la décision de la Ligue nationale de football américain qui oblige les joueurs à rester debout pendant l'hymne national, après que des centaines d'entre eux ont posé un genou à terre ou sont restés assis pour protester contre les violences policières. « C'est tellement typique de la NFL, lâche-t-il. Ils essaient juste de toucher leurs supporters de base et ils utilisent simplement l'hymne pour faire du faux patriotisme ou nationalisme, pour faire peur aux gens. »

Drame familial

Les vedettes de la NBA sont alors de plus en plus nombreuses à faire entendre leur voix sur les questions de justice sociale – du jamais-vu depuis les années 1960 et l'engagement de Bill Russell ou Kareem Abdul-Jabbar en faveur des droits civiques. Les entraîneurs, eux, sont beaucoup plus rares à s'exprimer, soit par crainte de contrarier les sponsors, soit par peur de fâcher des propriétaires aux positions plus conservatrices. Outre Steve Kerr, il n'y a finalement guère que son mentor Gregg Popovich pour se montrer si véhément. Après la mort de George Floyd, tué par un policier blanc en 2020, les deux entraîneurs participent à la création d'un comité de lutte contre l'injustice raciale. 

À entendre son adjoint Bruce Fraser, qui le connaît depuis l'université, le coach des Warriors tient son engagement de parents universitaires. « Les questions internationales, les enjeux de société et les opinions politiques étaient abordés à table », déclare-t-il dans un article du Guardian en juin 2018. Le père, Malcom Kerr, est président de l'Université américaine de Beyrouth. Steve, né dans la capitale libanaise, passe son enfance entre le pays du Cèdre, l'Égypte et la Californie. Mais il est déjà en Arizona lorsque le 18 janvier 1984, il apprend par un coup de téléphone la mort de son père, abattu de deux balles dans la tête par des membres du Jihad islamique alors qu'il se rendait à son bureau. Ce drame nourrira son combat pour le contrôle des armes à feu. Une « question de santé publique », estime-t-il en 2017 après une énième tuerie.

Au lendemain de la victoire de Donald Trump à l'élection présidentielle, Steve Kerr avait promis de tout faire pour soutenir son pays et le gouvernement. « Je veux ce qu’il y a de mieux pour nous. Et j’espère que Trump pourra le faire », avait-il confié. Cinq mois plus tard, passé l'effet de sidération provoqué par une politique ultra brutale, Steve Kerr est de nouveau entré en résistance. Reste à savoir si le monde sportif va le suivre.

Avec RFI 

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