À quelques semaines de son procès en France, l'ancien ministre congolais Roger Lumbala dénonce, par la voix de ses avocats, une justice « à deux vitesses » qui violerait la souveraineté de la République démocratique du Congo.
Le ton monte entre les avocats de Roger Lumbala et la justice française. À moins d'un mois de l'ouverture de son procès à Paris pour complicité de crimes contre l'humanité, l'ancien ministre et ex-chef rebelle congolais voit sa défense brandir l'argument de la souveraineté nationale et du néo-colonialisme judiciaire.
Dans un communiqué publié ce mardi 7 octobre, ses conseils Me Philippe Zeller, Me Hugues Vigier et Me Roxane Best accusent la France de détourner le principe de compétence universelle pour s'arroger le droit de juger des faits commis en République démocratique du Congo.
« La France agit en violation du droit international et dépasse les limites de la compétence universelle », dénoncent-ils, qualifiant la procédure d'« ingérence politique » sous couvert de justice internationale.
Roger Lumbala, ancien ministre, député et sénateur congolais, est poursuivi pour des faits survenus entre 1998 et 2003, pendant la deuxième guerre du Congo, l'un des conflits les plus meurtriers du continent africain.
Il s'agit du premier procès d'un haut responsable congolais jugé à l'étranger pour des crimes commis sur le sol national. Une première qui divise les opinions, à Kinshasa comme à Paris.
Pour la France, ce procès s'inscrit dans le cadre de la loi sur la compétence universelle (article 689-11 du Code de procédure pénale), qui autorise la justice française à perpétuer les auteurs présumés de crimes contre l'humanité, quelle que soit la nationalité des victimes ou le lieu des faits.
Mais pour la défense, il s'agit d'une instrumentalisation politique :
« On ne peut pas prétendre défendre les droits humains tout en niant la capacité d'un État africain souverain à juger ses propres ressortissants », affirment les avocats de Lumbala.
L'affaire dépasse désormais le simple cadre judiciaire. Elle pose une question de fond :
jusqu'où un État peut-il aller au nom de la justice universelle, sans franchiser la ligne rouge de la souveraineté d'un autre pays ?
À Kinshasa, certains juristes voient dans ce procès un précédent dangereux pour la justice congolaise, encore en construction mais déterminé à s'affirmer.
D'autres, au contraire, estiment que l'ouverture du procès à Paris traduit la lenteur et les limites de la justice nationale face aux crimes de guerre.
Toujours détenu en France depuis son inculpation en 2021, Roger Lumbala clame son innocence et promet, par l'implication de ses avocats, de livrer bataille jusqu'au bout, sur le plan judiciaire comme diplomatique.
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