La récente commutation de la peine de mort en perpétuité pour Marcel Malanga et d'autres citoyens américains impliqués dans la tentative de coup d'État de mai 2024 relance le débat sur l'équité de la justice congolaise. Maître Juvenal Djende, enseignant et chercheur sur les questions de fonctionnement de la justice, décrypte pour Élection-Net.com les enjeux juridiques et politiques de cette décision présidentielle.
Le cadre juridique incontestable :
Sur le plan légal, note-t-il, cette décision s’inscrit dans les prérogatives constitutionnelles du président. L’article 87 de la Constitution congolaise lui accorde explicitement le droit de grâce, lui permettant de "remettre, commuer ou réduire les peines". De plus, l’Arrêté n° 299/79 de 1979 impose un recours en grâce obligatoire pour toute condamnation à mort, une procédure respectée ici par le Procureur Général près la Cour Militaire de Kinshasa/Gombe. Ainsi, la commutation de la peine de Malanga est conforme au droit congolais, souligne cet éminent juriste.
Une contradiction politique flagrante :
Cependant, poursuit-il, "cette décision contraste avec la politique pénale récente du gouvernement. Après la levée du moratoire sur la peine de mort et les exécutions médiatisées de condamnés (comme les "Kuluna" de Kinshasa), cette grâce semble isolée. Pourquoi un traitement différencié pour Malanga et ses coaccusés américains, alors que d’autres condamnés à mort n’ont pas bénéficié de telle clémence ?", s'interroge-t-il avant de répondre : "La question est d’autant plus pertinente que Jean-Jacques Wondo, ressortissant belge condamné dans la même affaire, a été libéré discrètement en janvier 2025 sans mesure de grâce officielle".
L’ombre de la diplomatie américaine :
Pour lui, cette décision pourrait refléter des pressions diplomatiques des États-Unis pour protéger leurs ressortissants. Les cas similaires de Taylor Christa Thomson et Zalman Polun Benjamin, également condamnés à mort et potentiellement concernés par des commutations futures, renforcent cette hypothèse. La RDC, soucieuse de ses relations internationales, pourrait ainsi ajuster sa rigueur judiciaire en fonction des enjeux géopolitiques.
Enfin, cet analyste des questions de justice estime que "si la grâce de Marcel Malanga est juridiquement irréprochable, elle révèle une dissonance entre la théorie et la pratique politique en RDC. Entre application stricte de la peine capitale et interventions discrètes de puissances étrangères, le président Tshisekedi navigue dans un paysage complexe. Cette affaire pose inévitablement la question : la justice congolaise est-elle égale pour tous, ou influencée par des considérations extérieures ?"
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